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  Biographie de la vie







La punaise bleue

Ce ne sont que quelques extraits tirés d'un texte à la base complet. 
 
"Qu’on se le dise, et qu’on se le rappelle, on ignore ce que sera demain, et l’on ignore d’autant plus si on aura l’occasion de le savoir. Les rêves sont donc certainement faits pour nous permettre de tenir, de ne pas sombrer trop vite dans la perte de soi. Pour ne pas divaguer sans cesse, et réussir à maintenir un peu de notre cap. Car nous avons certainement tous besoin par moment, d’édulcorer certaines évidences qui se posent à nous. Parce que c’est vital, parce que c’est ainsi. Souvent, cette façon d’envisager le futur, en rêvassant, demeure un secret aux yeux de tous. Nous partageons rarement ce qui enrichit notre monde intérieur au mieux. C’est certainement cela, que l’on appelle notre bulle. Pour chacun composé différemment, mais qui se ressemble fondamentalement. C’est à cet endroit précis, dans cette bulle, que l’on se développe le plus. Bien plus que sous le regard avisé de nos parents, ou que dans la société même. " 
 
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"Les regards des gens qui ont grandit avec moi se sont métamorphosés. D’une expression naïve, on lit à présent toute la tristesse, les regrets, et la peur. Sans doutes désolés de s’être rendu compte que la vie n’avait rien à voir avec ces comptes de fées que l’on espère tous un jour vivre. Je me sens, en quelque sorte, à l’intersection même de ces deux sentiments. Une sorte de triste naïveté qui se permet de me poursuivre. Comme en transit, à observer de loin ce désespoir chez les autres, et à m’imaginer que tout reste encore possible. Je ne peux me convaincre que la vie soit une sorte de bordel ou l’on amasse les erreurs les plus grandes, pour finir dans un paradis guérisseur. Je ne suis pas non plus convaincu qu’il n’y ait, un jour, plus rien. Que ce soit l’effacement total de soi. Ce serait accepter que rien, n’ait jamais eu aucune importance. " 
 
 
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Extrait Chapitre 1 - L'enfance 
 
 
"Je voulais savoir, absolument tout ce qu’il me serait possible de savoir. J’aspirais à ce que chaque journée de vécu, ressemble davantage à une découverte qu’à une simple date sur un calendrier. Et finalement, peu importe le biais employé pour mener à bien tout ceci, que ce ne soit pas le meilleur ou le plus sage n’est pas l’essentiel. La vie, n’a, elle non plus, rien de sage. Il faut donc en être à la hauteur. Et c’est bien dans la jeunesse de l’age, qu’il est le plus amusant de s’essayer aux dangers. A cet age là, on ne redoute rien. " 
 
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"Je commençais, par la phase d’observation. Cette étape demeurera l’une des plus ultimes épreuves à passer chez moi. Chaque rencontre m’amène dans cet état de silence momentané souvent, permanent parfois. Selon les informations que j’arrive à récolter. A cette époque, mes sujets les plus évidents furent les adultes. Je ne crois pas que les adultes s’imaginent suffisamment à quel point ils sont en ligne de mire des enfants" 
 
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"Pour ma part, il suffisait que je lance un seul regard sur ce qui m’entourait, pour m’imaginer le monde comme une immense salle de jeu, je ne pouvais donc concevoir que d’autres puissent y voir quelque chose de totalement différent. Me prenait alors à rêver que mes grands parents, parents des miens, punissent leurs enfants de jouer avec les leurs, nous. Ainsi, nous aurions eu beaucoup moins de temps à perdre dans les bêtises, et eux, beaucoup plus de moments d’amusements. Tout le monde y aurait gagné quelque chose. Et combien de punition sur nous auraient pu être alors évitées ? Mais, mes grands parents ne l’ont jamais fait, évidemment. " 
 
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"Les flammes dansaient sous mes yeux ébahis devant tant de beauté. Je n’avais encore jamais rien vu de tel avant ce jour. Mon père avait jeté des tas de morceaux de bois, y avait versé minutieusement de l’alcool à brûler. Le feu a commencé à naître après qu’il ait craqué une allumette juste au dessus. Et j’étais restée là, contemplative, devant ce spectacle inconnu. C’était ça, ça ne pouvait être que ça. J’entendais au loin, les rappels intensifs de ma mère, qui était occupée à discuter avec une amie. Je l’écoutais, d’une oreille, m’expliquer un à un tous les risques que je prendrais si jamais je venais à m’approcher un soupçon trop près de ce danger. J’aurais pu simplement prendre en compte les conseils avisés qui m’étaient alors donnés. J’aurais pu rester là, inerte, et observer le calme et la beauté des flammes. " 
 
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"Je découvrais ainsi que le corps et l’esprit était deux choses totalement distinctes, fonctionnant à l’opposé l’une de l’autre. Si le corps a mal, alors l’esprit se convainc du contraire du mieux qu’il le peut. Si l’esprit souffre, le corps aura beau faire, il subira l’influence directe de ces humeurs spirituelles. Totalement liés et séparés, à jamais. A bien y réfléchir, on s’ aperçoit avec le temps que l’esprit est drôlement plus fort que notre corps. Il subit des milliards de choses en plus au quotidien. On s’épuise soi même. " 
 
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Extrait Chapitre 2 - L'école des grands 
 
 
"Les matins de septembre ont tous une sorte de nostalgie incroyable. Il fait encore bon dehors, mais le vent léger du matin, et le silence des rues semble montrer le monde d’une tout autre façon. Comme si les éléments de la terre entière s’étaient cloîtrés pour songer, à l’été qui se termine, à l’hiver qui bientôt arrivera. J’ai descendu la rue, respirant l’air frais, et arrivé à l’arrêt de bus, je me suis accroché aux rares personnes que je connaissais. Quand je suis monté dans le transport, j’ai eu l’impression que le trajet a duré des heures. Je n’étais pourtant qu’à quelques minutes de ma nouvelle école. Une fois passé le portail d’entrée, je savais que cela marquerait un commencement. C’était à la fois très attirant, et effrayant. Mais je n’avais pas le choix que d’avancer. J’ai suivit les autres collégiens, en cherchant désespérément des visages que je connaissais dans la foule. Plus je marchais, et plus je découvrais l’ampleur de l’établissement. Cela me semblait soudainement bien plus grands que dans mes souvenirs. J’ai de suite repéré le préau, endroit parfait pour se terrer. Si ce n’est un premier jour de rentrée scolaire. Des feuilles de copie accrochée un peu partout était censé nous diriger. Sur chaque feuille, le nom d’une classe, avec la liste des élèves en faisant parti. J’ai eu un mal fou à trouver la mienne. " 
 
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"J’aurais pu simplement m’intégrer, de façon très facile. Je n’ai pas vraiment de problème de contact, je pense m’adapter aisément aux gens. Mais si la facilité est là, l’envie manque. Je ne voulais pas avoir une foule d’amis, cela ne m’intéressait en rien. Raisonnait alors les discours que ma mère m’avait servit sur l’amitié. Et elle y était très claire, des amis, on en a peu. Ils sont rares, et c’est cette rareté qui les rendait si importants. Je ne voulais donc fraterniser avec trop de monde. Je préférais me taire, et écouter pour que mon choix se porte sur les personnes les plus adéquates pour moi. Rencontrer des gens semble toujours ressembler à une sorte de casting. On se montre sous son meilleur jour, pour attirer une forme de sympathie. J’ai donc pris le parti de ne pas me montrer. Pour ne pas me distinguer, afin que le choix n’appartienne qu’à moi, en un sens. " 
 
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"Cette sensation d’être égarée n’était sue que par moi, jusqu’à ce jour, ou maladroitement, je me suis réveillée quelques instants trop tard.  
Sur mon emploi du temps, le numéro de salle était inscrit, mais l’indication donné ne m’aidait en rien à trouver le bon étage, le bon couloir, la bonne porte. Tout le monde était déjà en cours, et j’allais arriver, avec un certain nombre de minutes de retard, sous les yeux de toute ma classe. C’est alors que j’ai commencé à réfléchir à l’excuse que j’allais invoquer, et l’idée de parler tout haut ainsi, devant tout le monde a fait monter d’un cran l’angoisse. Je commençais à ne plus chercher, tant j’étais paniqué à cette idée. Mon drame ne s’est pas arrêté là ce jour là. " 
 
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Extrait Chapitre 3 - La rencontre 
 
"Je commençais à comprendre à peine que le fait d’avoir changée d’école ne m’aiderait en rien à grandir. Que le but de tout ça n’était pas l’endroit, mais bien ce que j’allais y vivre. Le décor de ma vie s’installait tranquillement sous mes yeux. Cela faisait plusieurs mois que l’année avait débuté, il me semblait que c’était le moment parfait pour utiliser tout ce que j’avais pris soin d’étudier chez mes chers camarades. J’allais entrer en programme d’intégration. A force de les avoir observé, j’avais pu prendre une certaine assurance en moi-même. Je savais ce que je pouvais dire ou non selon les personnes. J’avais pu définir qui pouvait être quelqu’un de confiance ou au contraire, quelqu’un à éviter. Je comptais à présent sur l’humour, pour m’attirer la sympathie de ceux que j’avais sélectionné. J’étais convaincue que c’était l’arme la plus infaillible que j’avais en ma possession. " 
 
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"Je n’avais qu’à ouvrir la fenêtre de ma chambre pour que la musique inonde toute la pièce. Je ne résistais jamais à l’envie que cela me procurait de m’y rendre. Pleine d’enthousiasme, je descendais ma rue, ravie de toutes les couleurs que j’allais découvrir à quelques pas de là. Il y avait cette attraction, ou il fallait crier très fort. Le gain pour s’être arracher les cordes vocales valait le coup. Un tour supplémentaire et gratuit. Je savais que seule je n’obtiendrais rien contre ceux qui, plus malins et plus entourés, montaient à deux dans ce manège. J’ai observé autour de moi, et j’ai vu ce garçon, qui avait l’air aussi seul que moi à ce moment précis. Son visage m’était familier, je l’avais croisé plusieurs fois au collège, mais nous ne faisions pas partie de la même classe, et nous ne nous étions jamais réellement mélangés aux autres élèves. Il semblait discret, introverti, mais il avait aussi un air sympathique. Ce genre de visage qui ne vous laisse pas douter du bon fond de la personne. J’ai eu une petite hésitation quand au fait de l’aborder. J’ai fini par m’approcher de lui, et lui proposer de partager notre tour dans l’espoir d’en remporter un de plus. L’idée l’a séduit autant que moi et il s’est prêté volontiers au jeu. Nous nous sommes mis à hurler ensemble, sans même se connaître. C’était un peu perturbant de partager un moment d’euphorie avec ce garçon dont je ne connaissais rien. Je n’avais pas pu prendre la peine de l’observer, lui. Je ne savais pas ce qu’il y avait au plus profond, mais cette prise de risque, ce relâche de contrôle, m’a fait un bien fou. Les tours se sont enchaînés, nous faisions une équipe de choc. Lorsque enfin nous sommes descendu du manège, la conversation s’est spontanément engagée. " 
 
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Extrait Chapitre 4 - J’ai un secret, mais personne ne le sait 
 
"L’année d’après, tout allait changer, j’allais être seule. Fini le soutien des récréations. Pour la première fois de ma vie, je prenais une pause pour regarder en arrière. Tout ce que nous avions traversé lui et moi depuis notre première année de collège. Nous allions prendre deux chemins totalement différents. Mais cette année là, la dernière que nous allions vivre, allait bouleverser ma vie entière sans que je ne m’y attende. L’enfant qui sommeillait en moi, avide de découvertes, allait pouvoir être totalement comblée. J’allais apprendre la chose la plus fondamentale qui soit, ce que je suis. J’allais devenir quelqu’un, avec une réelle identité. L’année a donc débutée ainsi, sans que rien ne me présage quoique ce soit. Les jours, les semaines puis les mois ont commencés à s’écouler de façon totalement normale. Dans la suite logique de tout ce qui m’avait précédé. " 
 
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"Le jour venu, j’ai passé le portail, comme chaque matin. Je ne savais pas à ce moment précis que ce serait la dernière fois que j’entrerais dans mon collège de cette façon. Sans y prêter attention, j’ai traversée l’allée qui me séparait du préau, j’ai marché d’un pas décidé jusqu’à mon groupe d’amis. La préparation mentale dont je faisais preuve pour raconter les évènements dans l’ordre le plus chronologique était épuisante. J’aurais voulu tout dire, en même temps. Mais dès mon premier pied sous le préau, une amie me saisit le bras pour me guider jusqu’à notre groupe. Elle semblait tout aussi impatiente que moi, mais je n’en connaissais aucunement la raison. Soudain, je l’ai entendu me dire qu’elle avait une personne à me présenter. Quelqu’un de nouveau aurait il fait son apparition dans ce collège ennuyeux ou les gens sont toujours les mêmes ? Je me languissais alors de la découverte. " 
 
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"J’ai levée les yeux, pour enfin voir ce visage. Et c’est à ce moment précis que toute ma vie, en une seule fraction de seconde, a basculé. " 
 
"Le doute qu’elle avait fait installer sur ma vie était immense. Je ne croyais plus en rien. Je m’étais aperçue que toutes les idées que j’avais n’étaient qu’un ramassis des idées des autres. Je ne m’étais encore confrontée à penser le monde à ma façon. Je ne savais même pas très bien comment le faire. " 
 
"Le jour de mon anniversaire, mon secret et mon binôme sont arrivés ensemble, main dans la main. Mes yeux ne pouvaient se détacher de leur proximité. Mais je ne pouvais rien y changer, j’étais celle qui avait fait en sorte que tout cela arrive. Intérieurement, j’espérais, honteusement, une séparation entre eux. L’idée de souhaiter du mal aux deux personnes les plus chères à mes yeux m’insupportait. Je ne voulais en aucun cas être ce genre de personne. Quoiqu’il en soit, il faut croire que lorsque l’on espère quelque chose réellement très fort, cela arrive. Dans l’après midi, mon binôme m’a demandé de lui accordé cinq minutes de mon temps en aparté. Je suis allée m’enfermer dans une pièce, laissant tous mes invités momentanément seuls. " 
 
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Extrait Chapitre 5 – J’ai quelque chose à te dire 
 
 
"Septembre, ces doux matins, sa nature songeuse. Je revivais chaque instant comme le jour de ma sixième. L’angoisse en moins, il faut bien le dire. J’étais impatiente. J’allais retrouver mon secret, chaque jour. Jamais je n’avais été aussi motivée à reprendre les cours de toute ma vie, même si cela n’était pas directement lié à l’éducation, mais elle contribuait fortement à ma présence volontaire. Le premier jour de la rentrée, les feuilles de copie sous le préau m’intéressait bien moins que de retrouvée sa trace. Pour que ma journée débute bien, c’était son regard que je devais croiser. Je savais que cela marquerait le point de départ de cette nouvelle année, à ses côtés. " 
 
"Je crois que je n’en pouvais plus de voir mon secret de loin. Mais ce jour là, contre toute attente, elle est venue à moi. Et sans le savoir, elle allait bouleverser une fois encore, toutes mes pensées les plus profondes. Elle est arrivée à ma hauteur, m’a tendu une feuille de papier pour laquelle la règle était très claire. Je n’avais la permission de lire son contenu qu’une fois hors de sa présence. La feuille n’était pas seule. Pour l’accompagner, il y avait une petite peluche bleue qui virait au vert. Une peluche abîmée, qui laissait ressortir tout le vécu qu’elle avait dut subir. J’attendais impatiemment le début des cours pour pouvoir enfin comprendre le message que mon secret m’avait ainsi apporté. " 
 
"Je commençais à ne plus supporter ma solitude, mon silence. Il fallait que j’en parle, il fallait que je lui en parle. Oui, bien sur, il n’y avait que ça, mais je ne pouvais pas le faire. Pas à elle. Elle aurait pu avoir peur de mes propos, et j’aurais pris le risque de la perdre totalement. Je ne pouvais pas me lancer tête baissée. Un grand feu ne m’avait fait tant peur des années auparavant. Et comme elle ne pouvait pas être celle qui entendrait ces mots, il a fallut que je choisisse une option plus sure. Ce jour là, mon binôme a changé de titre dans ma vie. Il ignorait tout de ce que je cachais au fond de moi, comme tant de personnes. Mais j’allais lui ouvrir une porte sur mon esprit. Durant cette soirée, il est devenu mon meilleur ami. " 
 
"Avant d’appuyer sur « envoyer », j’ai dut relire ces mots cent fois. Je n’en croyais pas mes yeux. Voilà que sans aucune réflexion, je venais de me laisser guider par mon esprit qui avait la réponse à mes interrogations depuis le début. Je n’avais pas su l’entendre simplement parce que je faisais trop de bruit. Mais tout était tellement clair à présent. Tout expliquait chacune de mes attitudes depuis le départ. Si j’avais su, ne serait ce qu’une seule fois, m’écouter à cette époque, je n’aurais pas tant perdu de temps à m’user. Pendant l’espace d’un instant, ce fut un soulagement total. Une libération telle que j’ai envoyée ce message, sans me soucier de la suite. La difficulté n’était finalement pas de l’avouer à quelqu’un, loin de là. Il fallait d’abord réussir à se l’avouer soi même. Et ce fut le plus pénible. Après avoir enfin élucider mes doutes, voilà que je me sentais très mal. Le moment de sérénité n’a duré qu’une ou deux secondes, tout au plus. J’entrais dans un nouveau combat. Entre ignorer et savoir, il y a une similitude frappante, c’est la difficulté que l’on a pour accepter. " 
 
"Nous nous étions donc rencontré pour ça. Le destin nous avait mis sur la même route, sans doute persuadé que cela nous aiderait à la traverser. Je n’avais plus aucun doute quand à l’importance que mon binôme avait dans ma vie. Pour la première fois, j’envisageais que notre amitié de six années pouvait être une amitié de toute une vie.  
Je n’ai pu m’empêcher de m’entretenir avec lui de vive voix après ça. Je lui ai téléphoné, j’avais besoin de l’entendre me dire que tout cela était vrai. Il fallait aussi que je le dise à haute voix. Que je m’entende prononcer ces mots. C’était une sorte de passage obligé pour l’accepter. Lorsque j’ai raccroché, à défaut d’un soulagement, j’ai eu le sentiment que cette soirée fut la pire de ma vie. " 
 
"Peut être qu’elle ne me disait rien car il est aussi difficile de dire que l’on sait, que de dire ce que l’on est. " 
 
"J’anticipais toutes malchances. Je déposais donc mes mots, et prenait soin de décrire une à une, chaque émotion ressentie depuis le jour de notre rencontre. Je n’hésitais pas à user de détails, si insignifiants pouvaient ils être. Plus j’écrivais, et plus je sentais cette libération frôler mon âme. Les jours suivants, à l’école, je me sentais beaucoup mieux. J’avais la sensation d’avoir dit tout haut, ce que je pensais tout bas. Sans l’avoir perdu. C’était une sorte de combat dont je sortais victorieuse. Elle restait malgré tout mon secret le plus cher et inavouable." 
 
"Dès que j’ai ouvert mes yeux, j’ai sentie que la journée allait être rude. J’étais au plus bas moralement. Je ne pouvais m’expliquer ce changement de comportement entre les jours précédents et ce moment là. Quoiqu’il en soit, je me sentais triste. Et je n’en avais plus que faire de toutes mes résolutions. J’allais mal, c’était la seule chose que j’arrivais à avoir en tête. Tout ce que j’avais su mettre de côté depuis la rentrée était en train de me rattraper soudainement. " 
 
"Il fallait que j’affronte ses yeux, que je la vois réagir. Qu’elle me fasse mal pour peut être me guérir. Je voulais souffrir, j’attendais cette violence de sa part. J’en avais besoin pour admettre que tout ceci n’était qu’une illusion stupide. Que la seule qui voyait une importance concrète à cette relation, était moi. Je voulais qu’elle devienne un mirage, qu’en ouvrant les yeux, plus rien ne soit aussi présent que je pouvais le croire. Les deux dernières heures de ce mercredi là, en mathématiques, je n’entendais rien de ce que le professeur nous disait. Je ne sentais que la caresse de mes larmes glisser le long de mes joues. Et j’attendais, impatiemment, que l’heure se termine pour enfin m’enfuir de là. Aller au plus loin d’elle. Ne plus risquer de la croiser dans les couloirs. Lorsque, enfin, fut l’heure de partir, je n’ai pas pris mon temps comme j’avais l’habitude de le faire. Je ne voulais pas la saluer. Je voulais manquer d’oxygène ce jour là. Etouffer mes pensées, tant bien que mal, au fond de moi. Je me suis pressée pour ne pas la croiser. Et je suis rentrée chez moi, m’enfermer dans ma chambre. " 
 
 
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Extrait Chapitre 6 – Mon secret Moi = … 
 
 
"Avait elle remarquée que ma visite n’était en rien innocente ? Je sentais qu’elle avait percé à jour ce que je voulais lui dire, et ce que je tentais par la même occasion de lui cacher. Je ne sais pas ce qui se passait en elle, à cet instant, dans son esprit. Je peux juste dire que pour moi, c’était la confusion totale. Ça m’a paru durer des heures alors que tout s’est enchaîné sur quelques minutes à peine. Elle a plongé, à nouveau, son regard dans le mien, et précisément à ce même moment, elle a perdu son sourire. Elle a ouvert la bouche, prète à me parler, et j’angoissais des mots qui allait en sortir. Elle avait, elle aussi, quelque chose à me dire. Je n’avais aucun doute quand au contenu de ses propos. Elle avait tout comprit, et elle allait me faire entendre que tout ceci n’était pas sain. Et elle aurait eu raison. On ne peut pas, par définition, être l’amie de quelqu’un que l’on aime. " 
 
"Elle semblait ne pas vouloir affronter ma réaction. Comme j’avais peur de me confronter à la sienne. " 
 
"Je serrais le mot dans ma main et je n’étais plus tout à fait sure de vouloir y découvrir ce qu’elle y avait inscrit. Et si c’était le moment de ma vie ou j’allais faire ma chute ? Je réfléchissais et j’angoissais de ce qui allait changer après avoir déplier le papier. Et si la douleur que je ressentais alors n’avait été qu’un léger aperçu de tout ce qui m’attendait après ça ? Je n’étais pas persuadée de m’être suffisamment préparée à cette éventualité. Le doute m’a envahit, puis, je suis entrée dans une seconde phase. La curiosité peut être féroce. Elle vous pousse parfois à franchir les limites de ces endroits ou vous n’auriez jamais voulu mettre les pieds. L’ignorance est certes une souffrance, mais parfois, savoir est encore bien pire. " 
 
"Le plus incroyable est de se demander à quoi pouvait elle bien penser pendant ces minutes ou j’hésitais simplement de recevoir sa confession. Est elle restée derrière sa porte à guetter le moindre bruit de réaction de ma part ? Ou est elle allait se réfugier dans sa chambre, regrettant d’avance d’avoir osée ? Peut être a-t-elle simplement continué sa journée, totalement persuadée d’avoir fait le bon choix, ou peut être qu’elle ne s’est pas posée de questions. J’avoue que je n’en ai aucune idée. Parfois, on s’interroge sur la façon dont les gens perçoivent une situation dans laquelle nous sommes impliqués, nous aussi. Mais sait on réellement, un jour, de quoi il en retourne. Je mesurais en lisant ces mots, le courage dont elle avait fait preuve et qui n’avait d’égal que ma lâcheté. Voilà, c’était dit, du moins pour elle. Elle avait avancé vers ce feu, et cette fois ci, je reculais. J’allais finir ma journée comme je l’avais commencée, en larmes. J’étais venue à sa porte pour qu’elle me brise. Je ne voulais que ça, je n’attendais rien d’autre. C’est en partie pour cette raison que je n’avais réussi à ouvrir la bouche sur ce sujet. C’est pour tout ça que je n’avais pas trouvé la force de parler. Voilà qu’en quelques minutes, à défaut de me briser le coeur, elle l’avait consolidé. " 
 
"J’ai déversé chaque mot qui me venait en tête, et sous mes yeux, là, se déposait peu à peu toutes ces pensées que j’avais refoulées, estompées, et refusées. Je découvrais l’ampleur des dégâts qu’elle avait déjà infligé à ma vie rien qu’en écrivant. Je ne pouvais pas aller contre ce que je ressentais. Je ne pouvais pas lui donner d’autre réponse que celle-ci. J’ai fais long, très long. Je n’ai pas l’art de résumer mes pensées comme elle. Il fallait que j’explique, que je justifie, que je détaille. Quoiqu’il en soit, sans aucune réflexion je me suis laissé portée par l’envie de dire tout ce que j’avais sur le cœur. Et ma conclusion fut la suivante. Nous ne pouvions rien y faire. Elle, comme moi, si tant est que j’acceptais de croire en ses mots, n’avions pas plus choisis l’une que l’autre le flot d’émotions qui s’emparait de nous. Je n’avais jamais prévu que ma vie ressemble à ça jusqu’à ce jour. Quand bien même quand j’ai commencé à comprendre d’où me venait l’état dans lequel elle me mettait, pas une seule fois je n’aurais eu l’idée de penser le vivre un jour. Alors, instinctivement, comme un élan de protection, en me déchirant le cœur de l’écrire, je lui ai demandé d’oublier, simplement. " 
 
"Je lui ai souris, lui ai donné le mot, puis j’ai fais ce que j’avais promis de ne jamais faire. J’ai tourné les talons, et je suis partie sans dire un mot. Je me suis rendue en salle de classe, et au moment de m’asseoir, j’ai pensé qu’elle était dans une salle non loin de la mienne, et qu’elle allait découvrir ma lettre. Les regrets ont commencés à pointer le bout de leur nez. Je n’étais plus sure de rien. Venais je de faire la folie de sacrifier toutes mes envies seulement pour ce que d’autres auraient pu en penser ? J’avais été franche, j’avais exprimé chacune des peurs que tout cela pouvait me procurer, mais ma conclusion devenait floue. Je ne sais pas ce que j’aurais pu lui dire d’autre à cet instant là, je crois qu’aucune autre option ne m’apparaissait clairement. Je savais que j’avais fait le bon choix, vis-à-vis de tout et de tout le monde. Mais je doutais d’avoir fait le bon vis-à-vis de moi. " 
 
"Mais d’aussi loin que je tentais d’être d’elle, je ne pouvais m’empêcher de l’observer. J’espérais intérieurement que ce soit elle qui me rattrape. C’est un peu ce que l’on espère toute notre vie non ? Que sans rien dire à personne, quelqu’un cesse pour une fois de nous tendre la main, et nous l’impose. " 
 
"Jamais elle ne venait à ma hauteur pour me sauver de mon gouffre. " 
 
"Si elle ne m’avait rien dit, je n’aurais trouvé le courage de le faire. Mais j’aurais cherché à plein temps les mots qui auraient pu m’y aider. Or, maintenant que le premier pas m’avait été donné, j’en faisais un en arrière. Elle était pourtant mon secret, mon âme sœur à ce moment là. Je n’en avais aucun doute. Je me prenais alors à rêver que notre histoire soit sublimée par cette absence de vécu. Je savais que j’en souffrais au possible, mais là encore, ce que je ressentais n’avait que peu d’importance tant mon inquiétude était de la faire souffrir, elle. Je ne trouvais mon réconfort qu’ici, dans cette idée éventuelle que si nous ne vivions rien, alors aucune de nous n’aurait réellement le cœur brisé. Une histoire forte, et belle, à panser. Mais très vite, j’ai pris conscience que les contes de fées n’ont aucune similitude avec la vie réelle. " 
 
 
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Extrait Chapitre 7 – Un jour, en décembre… 
 
"C’était un jour, en décembre, un jour comme les autres. Deux jours plus tard, nous allions être dans une nouvelle année. Mais ce jour là, j’étais à bout. J’avais épuisée toutes les forces que j’avais pu avoir. Il fallait que j’en finisse. " 
 
"Entendez moi bien, ce que je veux dire par là, c’est qu’il n’y a pas plus forte façon de grandir que de s’élever à l’amour. Le seul sentiment sincère que l’on connaît réellement à cet age est encore l’amour de nos parents, ou parfois, de nos amis. Mais l’amour, dans le vrai sens de son terme nous est plus inconnu que toute autre chose. S’échouer sur une autre rive que celle de notre famille, est une façon de couper le cordon qui nous relie à elle. Je n’aurais pas imaginer couper ce lien avec une autre personne que mon secret. " 
 
"Si après plusieurs mois passés à l’ignorer, elle en était restée, comme moi, au même point, ça ne pouvait qu’être sincère. Et si par hasard, ça l’était autant que cela pouvait l’être en moi, alors oui, c’était certain, j’étais en train de passer à côté de ma vie. " 
 
"Elle s’est alors retournée, et s’est avancée vers moi. Je l’observais, droit dans les yeux, mes jambes tremblaient. Je ne savais plus très bien si j’avais bien fait de lui signaler. Mais j’appréciais ce moment ou l’ignorance de ce qui allait se passer m’envoûtait totalement. Ce regard fixe que nous nous lancions n’aurait pu être perturbé par rien à ce moment là. Je sentais une sorte de bulle s’emparer de moi, qui donnais l’impression que plus rien ne pouvait me toucher, à part elle. Je crois qu’elle m’a souris, et ce sourire m’a totalement apaisée. L’inconnu ne me faisait plus peur, c’était certain. Elle s’est avancée encore un peu, puis m’a embrassée…" 
 
"J’ai ressentie chaque doute qui m’avait traversé depuis notre rencontre, ces angoisses, cette confusion. J’ai serrée dans mes mains sa peluche. J’ai relu ce journal dans lequel je l’évoquais à demi mot, de peur d’être découverte, par les autres, par moi-même. Cette musique qui illustrait son premier je t’aime, celle qui avait servi de support au mien. L’effet qu’elle avait, inlassablement, sur mes humeurs. J’ai songée à tous ces instants de vie, ceux qui vous font grandir et découvrir une facette de votre personnalité que vous ignoriez jusque là. Me prenait alors à rêver que ma vie, à partir de ce jour, n’aurait plus à tant souffrir de ses doutes. " 
 
 
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Extrait Chapitre 8 – Au commencement… Vivons cachés 
 
 
"J’imaginais qu’elle en pensait au moins autant de son côté. Qu’à minuit, comme moi, elle ait eu la même pensée que j’avais pu avoir. Que même séparées, nous étions fondamentalement en liaison constante. " 
 
 
"Vivre dans le secret pour soi, et le mensonge devant les autres ressemble à une sorte de spirale de laquelle on ne peut se sortir. Je faisais partie de sa vie, elle faisait partie de la mienne. C’était sans nul doute la seule valeur sure que je possédais. J’étais bien loin de l’amie que l’on me croyait être pour elle à cette époque. Mais personne ne s’en doutait un instant. Je ne pouvais me défendre de mon statut dans son existence. J’étais là, mais tellement invisible. J’étais son ombre, elle était la mienne. En son absence, c’était un enfer à accepter. Mais dès lors que je passais du temps en sa compagnie, tout ça était oublié. " 
 
"Je dois dire qu’elle avait l’air tout droit sortie d’un autre monde. Elle dégageait une sorte de mystère incroyable. Le teint pâle, de blond cheveux très long et ondulés. Elle ressemblait à une poupée. S’émanait d’elle, aussi, une grande douceur. Dans sa façon de parler, dans ses gestes envers les autres. Le genre de personne qui attire, sans même vous demander si c’est la réalité ou non. Quoiqu’il en soit, elle paraissait réellement agréable dans son attitude. Et c’est ce que je retenais de chacune des fois ou l’on se croisait dans la cours de l’école. Je n’ai pas coupé à tout ça. A peine j’avais pris le temps de discuter quelques fois avec elle, que j’étais totalement emballée quand à l’idée de devenir une potentielle amie de cette fille. " 
 
"L’arrivée de la nouvelle avait chamboulé pas mal de choses dans nos quotidiens à tous. On pourrait se demander comment les choses se seraient passées si elle n’avait jamais apparue dans nos vies. Quoiqu’il en soit, elle avait eu un effet sur l’humeur de mon secret. J’avais du mal à comprendre ce que cachait son regard vide, mais je savais que quelque chose n’allait pas parfaitement, et qu’elle était en proie aux doutes les plus profonds. Je crois d’ailleurs, que c’est la première fois que je l’ai sentie plus inquiète que moi. Son regard ne pouvait tromper. Au bout de quelques jours où je n’osais pénétrer son moi intérieur, j’ai finis, à force d’inquiétude, par lui demander. Je n’ai pas tourné ma question pour savoir ce qui n’allait pas. Je connaissais sa difficulté à s’ouvrir sur certaines choses, alors je tentais de ruser pour avoir les réponses, de façon détournée. Je lui ai simplement demandé ce qui, dans l’absolu, à cet instant précis, lui aurait fallut pour qu’elle se sente mieux. Je ne m’attendais pas à ce que ma formulation soit aussi efficace. Sa réponse fut très claire. " 
 
"Normale ! Ne l’étions nous pas ? Je ne me sentais en aucun cas moins humaine que n’importe qui d’autre. Que celui qui sait aimer sans avoir de cœur se lève. Y avait il une réelle raison à considérer toute notre histoire comme quelque chose de totalement fou ? J’avais beau me concentrer et réunir toutes mes possibilités de réflexion sur cette question, je dérivais toujours à me demander ce que pouvait bien être la normalité. Après tout, nous n’étions certainement pas des cas rares. Il suffisait de voir autour de nous. Nous n’étions pas moins de quatre à s’être réuni en ayant osé affronter notre vérité. Nous pouvions donc imaginer que dans ce collège, cette ville, rodait des tas d’autres personnes dans la même situation que nous. Et si nous étions encore plus nombreux, alors en aucun cas nous ne pourrions dire que nous sommes anormaux. Nous aurions été en trop grand nombre pour pouvoir bénéficier de l’exception d’anormalité que l’on nous prêtait. " 
 
Extrait Chapitre 9 – Vie, rêve et… 
 
"Les généralités ne sont jamais source de vérité absolue. Il n’y a bien que cette généralité là que j’accepte de croire." 
 
"Ce message ne m’a donc pas permis d’en savoir plus sur moi-même, mais il aura été à l’origine d’une immense confirmation quand à mes sentiments. Je n’étais pas curieuse, c’était d’un tout autre ordre. " 
 
"A ce moment là, j’étais vraiment en vie…" 
 
"Vous n’imaginez pas l’ironie de la situation. En train de prier un Dieu de me laisser conserver ce bonheur dans lequel je m’étais totalement enfermée, alors que la bible elle-même blâme ce genre de circonstances. A l’époque, je n’avais pas conscience que la symbolique de « l’amour pour tous » comportait un « mais », foudroyant sur place tout ce que je pouvais représenter. " 
 
"C’était notre première dispute. Je dois avouer que l’instant fut violent pour moi. Le ton qui monte, les mots qui blessent, il n’y a jamais rien eu de pire pour déstabiliser mon équilibre vital. C’est une véritable hantise pour moi, dès que je sens que la situation va s’envenimer, je n’ai qu’une envie, éviter que cela se propage, et aille trop loin. Mais souvent, on ne peut pas y faire grand-chose. Mon secret s’était confié à moi, et je n’ai pas pu recevoir ses confessions de la façon la plus objective qu’il soit. Elle avait, semble t il, trouvé une solution d’éradiquer, un à un, chaque problème de sa vie. Elle m’expliqua que pour enlever tout ce poids qui pesait sur elle, il lui suffisait simplement de s’éliminer. Ce discours avait provoqué en moi une sorte de confusion terrible. Si je comprenais l’envie de disparaître, pour ne plus souffrir, je voyais aussi un aspect d’abandon dans ses propos. Et ce point de vu là, je ne pouvais l’accepter. Comment pouvait elle ne serait ce qu’y songer, en sachant ma présence dans sa vie ? Qu’allais je devenir, y avait elle simplement pensée ? C’est alors que j’ai compris, que ce soit une idée folle lui traversant l’esprit, ou une réalité qu’elle envisageait profondément, je n’étais peut être plus la mieux placée pour entendre ce genre de choses. Peut être que mon objectivité n’avait plus totalement sa place entre elle et moi. C’est du moins ce que je croyais, à cet age là. Car en réalité, il ne devrait pas y avoir de meilleur confident que la personne que l’on aime." 
 
"C’est à peu près à ce moment précis, en pensant à cet éloignement à venir, que j’aurais pu comprendre combien mon identité s’était totalement mélangée à la sienne. Je savais d’avance, que sans elle, je n’allais plus vivre, survivre tout au plus. C’est assez étrange d’en avoir à ce point conscience, tout en ne comprenant pas combien c’était fou de vivre ainsi. Nous n’avions jamais été séparée plus de deux jours, le temps d’un week end. L’école rattrapait toujours nos impossibilités à se voir en dehors. Mais cette fois ci, tout allait être différent. " 
 
Extrait Chapitre 11 – Ce qu’on voit… 
 
La seule nuance imperceptible, était encore que je ne disais pas au revoir à une amie. " 
 
"Je ne pouvais expliquer à personne ce qui m’animait réellement. Chaque fois que je m’y essayais, je m’apercevais très rapidement de l’incompréhension qui m’entourait. Nous avions tous le même age approximativement, cela rendait les choses beaucoup plus compliqué. Mes amis en étaient tous à espérer vivre des moments de jeunesse trépidants. Quand à moi, je me fichais de savoir si j’étais en train d’user le temps qui m’était offert, ou au contraire, le gagner à quelque chose d’essentiel. " 
 
"Le monde semblait s’être arrêter de tourner. Et si les gens continuaient à vivre, je n’étais plus que le fantôme de moi-même à espérer son retour. J’avais bien conscience que son absence n’aurait pas du me laisser sombrer à ce point dans mes crises d’angoisses profondes, mais je ne contrôlais rien à mes réactions. " 
 
"Le soir, je comptais alors combien de temps me séparait encore d’elle. 32h, encore…" 
 
"Mais j’ai eu beau attendre, ce jour là, elle n’est jamais venue. " 
 
"Toutes les hypothèses que j’ai su trouver ont fait le tour de mon esprit, sans qu’aucune ne me donne aucune satisfaction. Je voulais savoir, j’en avais besoin. Ce jour là aurait du ressembler à de troublantes retrouvailles, un plaisir incontrôlable d’enfin pouvoir l’admirer à nouveau. Et voilà que je vivais les heures les plus sombres de toutes. J’avais cru avoir souffert de son absence jusque là, mais de savoir ou elle se trouvait rendait la chose finalement beaucoup plus facile que je n’avais pu le croire. Maintenant que j’étais dans le brouillard total, à ne pouvoir m’expliquer qu’elle ne soit pas venu au lieu de rendez vous, la sensation était bien pire. " 
 
"Lorsque la porte s’est refermée, j’ai eu un sentiment de déjà vu. Comme si ce trottoir était le point de départ, à chaque occasion que ma vie prenait un tout autre tournant. J’étais totalement figée, une fois de plus, à ce même endroit. Ses mots raisonnaient dans ma tête et je ne savais pas du tout comment je devais réagir. Il fallait que je parte, c’était la seule chose dont j’avais conscience. Pour le reste, je ne pouvais y penser tant la nouvelle m’étais tombée dessus violemment. Durant l’absence de mon secret, si ma terre s’est arrêtée de tourner, j’avais conscience que le monde autour lui, continuait d’exister. Les gens vivaient, pendant que je patientais. Tant de choses peuvent se passer en l’espace d’une semaine. Tant de choses s’y sont produites, sans même que je les soupçonne. " 
 
"Ce n’était pas une idée qui nous avait traversé l’esprit. C’était quelque chose de réfléchit, de repoussé durant des mois. Nourrit de frustration extrême. Si elle avait voulu savoir, elle aurait découvert la difficulté que nous avions eue, nous même, pour accepter l’idée que cela puisse être possible. Mais elle était sans doute aveuglée par sa colère, par son dégoût, par sa déception. Nous n’en étions pas aux temps des explications, il fallait des solutions pour elle. Et celle-ci était simple, il ne fallait plus que l’on se voit. Bien sur, cela semblait être compliqué, étant donné que nous allions dans la même école. Mais il fallait le faire. Nous devions nous éviter au possible. Comme si cela été d’une simplicité évidente. Comme si nous demander de renoncer à ce que nous même, nous n’avons pas su éliminer, se ferait si rapidement, sans souffrance. Mais personne ne se souciait de savoir ce que nous ressentions. Personne n’est venu le demander à mon secret, personne ne m’a posée la question." 
 
"C’est l’amusement dans le regard des autres qui arrivent en premier. Ils nous observent, comme deux bêtes de foire, à se demander quand nous ferons le premier faux pas. Un peu trop de proximité visible, et voilà que nous aurions pu être blâmé plus que le diable lui-même. Un peu trop de distance, et l’évidence se serait exposée au grand jour que nous voulions cacher quelque chose. Nous ne savions plus très bien comment agir l’une envers l’autre. Il semblait que chacun de nos gestes, de nos paroles, de nos regards, ne soient pas des plus à l’aise. Notre retenue démontrait de façon évidente ce que nous ne voulions pas montrer. " 
 
"Je n’avais pas tant peur que ça, même si je n’en riais pas autant de l’intérieur, que je le laissais penser à l’extérieur. En réalité, ce n’était pas de la peur qui m’envahissait, mais un dégoût du genre humain. A s’ennuyer trop, à ne pas balayer devant sa porte, à ne pas envisager que des situations comme celle-ci, même pour d’autres raisons, pourraient leur arriver à eux aussi" 
 
"Notre mot d’ordre était pourtant clair, discrétion. Elle faisait preuve de beaucoup d’astuce pour se sortir de ce mauvais pas. Et je ne pouvais nier le fait que si j’étais mal reçu au collège, elle, elle devait affronter les foudres le soir, une fois chez elle. La situation était bien plus ingérable de son côté que du mien. " 
 
"Elle semblait tenter de se convaincre que finalement, tout ça n’avait plus d’importance, tout ce que nous étions, elle et moi. J’ai sentie mon cœur s’arrêter dans ma poitrine lorsque je l’ai écoutée, avec tout le détachement qu’elle pouvait tenter d’avoir à mon égard, me raconter ça. " 
 
"Furtivement, l’idée de tout arrêter là m’a traversé l’esprit. Je crois que c’est la première fois que je me suis dit que finalement, l’amour pouvait être encore plus horrible en le vivant, qu’en s’en détournant volontairement. Peut être que je prenais en conscience, qu’aimer ne voulait pas forcément dire être heureux. Que le sentiment soit réciproque ou non. Il ne suffit pas de s’aimer, pour bien le faire. " 
 
"Elle redevenait celle que j’avais rencontrée, bien avant que je ne sois avec elle. cette fille qui se lassait rapidement des gens. Elle avait, avant moi, survolé je ne sais combien de personne, sans jamais s’y attarder suffisamment longtemps pour savoir ce qu’elle aurait pu tirer de cet apprentissage. Il me semblait être la première personne dans son existence, sur qui elle n’avait pas fait que s’arrêter un instant. Elle était restée, cela faisait des mois durant qu’elle était là, à mes côtés. Et je crois pouvoir dire que c’était bien là, tout ce qui faisait la différence entre les autres, et moi." 
 
"Je l’ai observée, du coin de l’œil, elle semblait bien, et heureuse. Je crois que ce moment est une sorte d’instant polaroid. De ceux que l’on fige dans notre esprit, pour ne pas oublier. Le cadre était parfait, l’ambiance était agréable, les gens qui s’y trouvaient étaient des gens que nous apprécions, et je prenais en conscience de la fragilité de ce genre d’instant. Pour la première fois, je comprenais que rien n’était acquis réellement. Mon apprentissage se renforçait lentement, je ne pouvais apprendre plus vite que cela. Je savais que certaines erreurs commises dans le passé n’allaient plus être reproduites avec cette révélation. J’allais profiter de chaque miette de ce qui allait m’être donné. De tout ce que l’on allait vivre, ressentir, et voir…" 
 
Extrait Chapitre 12 - Vacances, souffrances... 
 
 
"Lorsque nous sommes enfin tous sortis de nos salles, je me suis assise sur un banc, dans la cour. J’ai observé le décor qui avait été celui de ma vie durant toutes ces dernières années. Je me sentais déjà nostalgique de devoir quitter cet établissement ou tout avait changé pour moi. J’étais sure que rien ne pourrait jamais autant bouleverser ma vie, que cet endroit où j’avais mis les pieds. Le point de départ de toute une vie. Un moment étrange, magnifique, douloureux. Je passais en revue tous ces instants. Ces découvertes d’amitié, d’amour, de soi. Je discutais avec certaines personnes dont je savais que la distance qui allait nous séparer ruinerait les liens que nous entretenions. Et je la regardais. " 
 
"Au moment ou elle est partie, je l’ai sentie froide, et son comportement m’a fait entrée dans un état second que je ne pourrais expliquer. J’étais totalement dépassée par ce qu’il se passait. Ça ne pouvait pas se terminer ainsi, c’était totalement impossible. Et pour m’en préserver, quelques minutes après son départ, j’ai tentée de la rejoindre sur le chemin qu’elle avait emprunté. " 
 
"Mais comme elle, je n’ai rien fais. Je n’en avais aucune envie, je voulais tomber sur cet obstacle, ne plus me réveiller. Me sentir enfin libérée d’elle, de moi. L’idée de ne plus être là, pour la seule et unique fois de ma vie, ne me faisait plus du tout peur. Sans elle, à quoi bon ? " 
 
"Une fraction de seconde avant d’enfin m’écraser au sol, je l’ai vu, elle s’était retournée… Les choses ont alors été très vite, sans le vouloir, j’allais faire de mon secret, ma sauveuse. Au moment de la chute, j’ai glissé sur plusieurs mètres, mon corps se baladait sur le béton, comme propulsé de toutes ses forces. Je sentais la douleur du frottement. Ma peau se déchirait sur chaque centimètre que mon corps parcourait, sans que je ne puisse rien y faire. J’ai entendu des pas, s’approcher rapidement de moi. J’ai sentie la panique qui s’entourait de mon corps inerte. J’étais là, et absente à la fois. J’assistais à la scène, comme si je n’en faisais pas partie, mais je ne pouvais y participer, car mon corps ne m’en laissait pas la possibilité. " 
 
"J’étais comme loin, et si le monde semblait bouger à vitesse normale, je me sentais comme dans un ralenti de ma propre existence. J’ai bien cru être en train de mourir ce jour là, tant j’étais sonné par le choc violent que je venais de subir. Mais il n’en était rien. Je me souviens que je l’observais, c’était la seule chose que j’arrivais à voir, son regard. Elle me contemplait, interrogative. Je sentais bien qu’elle se demandait ce qui avait pu se passer, derrière son dos, pour que je tombe ainsi. Elle ne semblait pas comprendre que j’avais volontairement évité de me préserver. Que vivre ne m’apparaissait plus comme une évidence, si je ne pouvais pas le faire à ses côtés. " 
 
"Je l’ai donc appelée, j’avais besoin de l’entendre, peut être autant qu’elle attendait d’être rassurée. Je lui ai dis que j’allais bien, je n’ai même pas le souvenir de lui avoir évoqué combien j’avais mal, partout sur mon corps. C’était sans importance. Et lorsqu’elle m’a demandé comment tout ça avait pu se produire, j’ai alors donné une version de l’histoire totalement brodée, la même que j’allais donné à tout le monde, durant longtemps. Je n’avais donc pas vu cette pierre sur laquelle j’avais malencontreusement roulée, j’ai fini par tomber, fin du récit. " 
 
"Je regardais au loin, comme perdue dans le vide. Je crois que j’attendais quelque chose pour m’éclairer. Je ne cessais de penser à l’état dans lequel je m’étais mise la veille. Non pas les blessures qui me faisaient me tordre de douleur, mais à ce sentiment incontrôlable qui a précédé l’accident. C’est là que je l’ai vu, ma lumière. Celle qui apparaissait toujours au moment ou j’en avais le plus besoin." 
 
"Personne d’autre que moi ne le savais encore, mais j’allais finir ma soirée célibataire. " 
 
"Si elle voulait me quitter, alors elle devait bien le faire. Elle ne devait laisser aucun détail de côté. Me briser le cœur, pour qu’il ne se répare jamais. " 
 
"Je voulais qu’elle parte, que plus jamais je ne croise ni son regard, ni sa personne. Qu’elle s’arrache de mon âme, et que j’en oublie chaque seconde passée à penser à elle, chaque minute d’angoisse, de doute, de bonheur. Je ne voulais pas qu’elle puisse se délecter de ma souffrance évidente. " 
 
"J’entendais ses pas s’éloigner, comme si ma propre vie était en train de s’éteindre lentement. Le bruit de ses pas, ressemblait à mon cœur qui lentement, s’arrêtait de battre. " 
 
Chapitre 13 - Au recommencement 
 
(...) 
 
Utiliser une personne, sans vraiment vouloir le faire, à des fins de guérison, je ne pense pas que ce soit le meilleur moyen de s’en sortir. Je crois que rechercher un substitut est la pire erreur que nous puissions commettre. Mais pour réussir, j’étais prête à tout. Même à accepter n’importe quoi, venant de n’importe qui d’autre que mon secret. Je ne voulais juste plus me retrouver seule. Simplement parce que je n'en pouvais plus de vivre en partageant mes heures avec mes démons. J’étais totalement motivée à m’oublier, à sacrifier, une à une, chacune de mes envies, pour ne plus avoir à penser à quoique ce soit d’autre. Une façon de ne plus exister, ou de le faire autrement.  
 
(...) 
 
J’ai bien pensé ce jour là, que le destin s’acharnait sur moi. Le seul endroit où je pouvais m’asseoir, était ce siège, juste à côté de cette fille, la seule que j’aurais voulu éviter, mon secret. C’était un choix cornélien à faire. Passer, ridiculement le trajet debout, ou accepter de me mettre à ses côtés. J’ai eu un sourire retenu, une façon d’estomper mon malaise au mieux. Elle m’a invitée à m’asseoir, et je ne pouvais refuser. Je ne savais pas quoi dire, je me suis installée, le regard dans le vide, et le souffle coupé. J’espérais qu’elle engage la conversation, pour que je n’eu pas à le faire, mais j’espérais aussi qu’elle se taise. J’avais peur de l’entendre me parler. J’avais peur de devenir à nouveau vulnérable en sa présence. J’aurais voulu être à un millier d’autres endroits à ce moment là. J’allais rentrer chez moi, retrouver ma misérable petite vie. Et je me demandais intérieurement ou était passé ce foutu bonheur que je ressentais lorsque j’étais avec elle, avant. Tout avait tellement changée. Elle aussi avait changé, physiquement surtout, mais elle restait celle que j’avais connu malgré tout. Je la regardais du coin de l’œil, discrètement, et je repensais à tout ce que nous avions vécu ensemble. 
 
(...) 
 
Et je n’aurais pas voulu être là pour voir ça. J’ai donc préférée me taire. Je gardais ce moment à moi, rien qu’à moi. Comme un cadeau qui m’aurait été offert dans le plus grand des secrets. Cet épisode ne m’a en rien aidée à me rapprocher de la relation que j’entretenais. Cela a même eu l’effet totalement inverse. J’étais lassée de ne plus m’émerveiller de rien. D’avoir peur, sans cesse, de ses réactions. De devoir en permanence, réfléchir à ce que j’aurais du dire, ou faire.  
 
(...) 
 
Je n’étais plus que l’ombre de moi-même. J’avais peur que ce baiser se termine, j’avais peur de m’apercevoir que tout ceci n’était que le fruit de mon imagination. Je n’osais pas ouvrir mes yeux à nouveau. Mais en les ouvrant enfin, c’était elle, et seulement elle que je pouvais voir. Finalement, les gens n’avaient pas tort, il faut pouvoir redonner son cœur pour guérir, peu importe à qui on l’offre, il faut que cela soit sincère. Le sort a voulu que celle qui allait me soigner, fût précisément celle qui m’avait rendue si malade.  
 
(...) 
 
Personne n’avait alors pu plonger dans mes pensées les plus intimes à ce point. S’il y a bien une seule personne en ce bas monde, qui connaît l’étendu de ce que j’ai pu penser de mon secret à cette époque, alors c’est bien elle. Lorsque j’ai su qu’elle avait volée mes pensées, qu’elle utilisait mon jardin secret comme argument à une nouvelle guerre entre elle et moi, je me suis sentie vide. Comme violée de l’intérieur. Mon esprit n’avait donc plus aucun secret pour au moins une personne. Je n’ai jamais ressentie une telle rage. J’aurais voulu la détruire, comme elle venait de faire partir en fumée tout ce que je conservais si précieusement. Personne n’aurait dut jamais savoir l’état dans lequel toutes les découvertes sur moi, sur ma vie, sur mon cœur étaient importantes à mes yeux. C’est quelque chose dont il était clair, que je ne pourrais jamais pardonner. La discussion qui s’en est suivi fut très expéditive. C’était décidé, il fallait qu’elle parte.  
 
(...) 
 
J’ai jetée un œil autour de moi, et je l’ai vu, posé là, près de mon lit, mon journal. Je l’ai pris dans mes mains, l’ai serré contre mon cœur. Il n’avait plus rien d’intime, les larmes coulaient sur mon visage tant cette situation me blessait au plus profond. J’ai relu une à une, chaque page de celui-ci, découvrant avec stupeur tout ce qu’elle avait pu savoir de moi. Prise de rage, je n’ai pas su me contrôler. J’ai déchiré chaque page, avec toute la haine que je pouvais ressentir. Une fois que j’eu fini la démolition volontaire de ces morceaux de vie, j’ai entrepris de réécrire, sans expliquer ce vide de plusieurs mois. Comme si ces mois là, n’avait jamais existé. Pour qu’elle n’existe plus vraiment, et pour que la douleur que j’ai ressentie soit effacée au fond. Il fallait que je passe à autre chose, comme une page qui se tournait. C’est là que j’ai levée les yeux, en savourant ce que j’avais retrouvé, bien plus que ce que j’avais perdu. Et je l’ai vu, accrochée à mon mur, ma punaise… 
 
(...) 
 
Chapitre 14 - Mon secret Moi = ? 
 
(...) 
 
Mais lorsque j’ai lu ses mots de rupture, illustré par un sentiment d’amour qu’elle me portait, je me suis effondrée. Je suis tombée au sol de ma chambre, comme si j’étais en train de mourir une nouvelle fois. J’étais recroquevillée, à me tenir le ventre de douleur. Le mal était insupportable. Je savais alors, qu’après deux défaites contre sa famille, je n’aurais plus jamais d’autre chance. Je savais, cette fois ci, que notre histoire était terminée, à jamais. Et ce fut l’évidence la plus difficile que j’ai eu à accepter.  
Je me demandais comment j’allais pouvoir supporter de parfois la croiser, et de survivre à tout ça. La seule chose que j’ai su faire, fut de m’enfermer dans cette tristesse. Ce n’était plus ma solitude qui était mon alliée, c’était bien ma peine. C’était presque comme une nouvelle amie. Et à dire vrai, je crois que je n’aurais voulu m’en séparer pour rien au monde. C’était encore la seule chose qui me permettait de faire vivre notre histoire, au fond de moi. Car même si je sentais là un point final à nos vies ensemble, rien ne pouvait être terminée. Je me le refusais totalement. 
 
(...) 
 
Si j’avais eu la possibilité de choisir, je n’aurais pas voulu la rencontrer, j’aurais aimé continuer ma vie comme elle l’était, avant de croiser son troublant regard. J’aurais alors pu éviter de souffrir à ce point, sans que ça n’en vaille vraiment la peine. Puis, chaque fois que je revenais à mes esprits, je comprenais qu’espérer de telles choses ne changerait rien à ma situation. Elle avait été là, et je ne pouvais le nier. Elle a eu l’allure du commencement de ma vie, je crois d’ailleurs qu’elle l’a réellement été. Mais d’avoir la certitude de tout ça, ne m’empêchait pas de songer qu’il me manquait quelque chose pour n’être plus sous son emprise. Peut être un réel point final à notre histoire. Il fallait que je me retrouve, que je devienne moi, sans être obligatoirement additionnée à elle. Il me manquait encore beaucoup d’éléments pour pouvoir me construire, de façon individuelle, sans elle. Voilà deux années d’écoulées, deux années ou j’ai aimée, et souffert pour elle. Il ne me restait plus qu’à en sortir, et le chemin semblait être d’une longueur interminable. J’aurais eu besoin de l’entendre me dire, à ce moment là, que tout ça n’avait pas été totalement vain. J’aurais voulu lui parler, et l’écouter me dire que cela avait existé, au moins de la même façon à ses yeux. Et tant pis s’il n’y avait plus de lendemain pour nous. J’aurais eu la certitude que je n’avais pas été seule dans cette histoire. Que tout ce mal, ne fut pas pour rien. Mais je ne faisais qu’attendre, sans que rien ne vienne… 
 
(...) 
 
Chapitre 15 - Et après ? 
 
(...) 
 
Plus j’avançais, moins je l’oubliais, et moins j’étais capable de m’accepter. C’était un peu comme si je vivais les choses à l’envers. Au lieu d’avoir souffert terriblement de ce que j’étais au moment où cela m’a foudroyé, j’avais réussi à passer au-delà, avec quelques doutes bien sur, mais sans trop souffrir. Mon mal n’était que pour elle. Maintenant que je me retrouvais seule avec moi-même, j’avais tout le loisir de m’user quand à tout ça. Je n’avais plus personne avec qui me partager. Je devenais totalement hermétique au monde extérieur. Mais le choix, je ne l’avais pas. Peu importe ce qu’elle deviendrait, si elle venait à changer aussi radicalement qu’étonnement. Peu importe ce que je continuerais de penser d’elle, tout ça n’avait plus aucune importance. Elle allait finir en moi comme elle avait commencé, comme une sorte de troublant secret. A la fois vrai, et inexact. Présente, et absente. 
 
(...) 
 
Je m’étais longuement préparée à l’éventualité de me retrouver en face d’elle. Je savais qu’il faudrait que je me montre forte. J’avais cours dans le lycée, la rue d’à côté. Celui qui était précisément collé au sien. Ils avaient une entrée communicante. J’espérais, silencieusement, ne pas avoir à la trouver sur mon chemin. Mais cela aurait été une sorte de miracle si cela s’était aussi bien passé. J’ai levée les yeux, et au bras d’un ami commun, je l’ai vu. J’étais à quelques mètres d’elle, et la sensation que j’ai ressentie à balayer chacune de mes bonnes intentions. Une sorte de poignard venait de s’enfoncer dans mon cœur. J’ai sentie une chaleur m’envahir, dans tout mon corps, dans chacun de mes membres. Les larmes ont commencés à noyer mes yeux, et ma seule option fut de ne pas l’affronter. J’ai tournée les talons, tout en me détestant d’avoir eu cette réaction. D’avoir croisé son regard, une fois encore, et de ne pas avoir su y faire face. Cette lâcheté qui me prenait à son simple contact. 
 
(...) 
 
Bientôt, la douleur que je ressentais, se changeait en rage, en désespoir, plus qu’en toute autre chose. Je ne m’expliquais pourtant pas, une telle réaction. La sonnerie a alors retentie. Sur l’instant, la reprise des cours m’a semblé me sauver de mes émotions. Je suis arrivée en cours d’anglais, dans un sale état qui, si fort en moi, m’a fait perdre l’équilibre. Une baisse de tension si forte, que je ne sais plus très bien, si j’étais encore là, ou totalement perdue dans mon mal. Je crois qu’aucune personne autour de moi, ne pouvait être en mesure de comprendre comment j’avais pu me mettre dans un tel état, simplement parce que je l’avais croisée.  
 
(...) 
 
Je crois que c’est à partir de ce moment, que j’ai cessée totalement de me projeter dans l’avenir. Depuis ce jour, je n’ai jamais su le faire correctement. Demain n’est de toutes façons rien, tant qu’il n’a pas été vécu. Je stoppais donc toutes possibilités de projets. C’était décidé, je ne ferais jamais partie de ceux qui savent se construire un avenir à l’avance. Je laissais mon présent s’occuper des éventuelles surprises que j’allais rencontrer dans ma vie, et il me semble que dans tous les cas, cela suffit amplement. J’étais tellement au plus bas, que je ne pouvais concevoir tomber encore un peu plus.  
 
(...) 
 
Je la maudissais, de tout mon corps, de toute mon âme, et de toutes mes pensées. Dans ces moments là, elle devenait sans le savoir, mon ennemie première. Je lui tirais ma révérence d’avoir su me faire croire qu’elle était différente du reste du monde. Et dans mes rares moments de descente, je me haïssais de penser ainsi. La faute était en réalité la mienne, de m’accrocher à ce point, sans trouver le moyen de me libérer totalement. J’étais en torture mentale permanente. Et mes vacances n’ont ressemblées qu’à ça. Deux mois de dérives totales. Un an déjà… Pas loin de trois en prenant notre histoire dans son intégralité. Et ma déconnection vacancière, n’avait pas encore suffit à me guérir.  
 
(...) 
 
L’entendre était supportable, l’observer aurait été déchirant. 
 
(...) 
 
Les gens allaient finir par tout découvrir sur ce que je me tuais à cacher, et je ne pouvais rien y faire. Ma seule option était de rester dans mon coin, sans essayer de désamorcer la bombe, et attendre que les premières hostilités me soient déclarée. Quelques jours se sont écoulés sans que rien ne se passe. Je crois que ce calme a suffit pour me faire croire que finalement, aucune guerre n’aurait lieu. 
 
(...) 
 
Je n’imaginai pas, au moment de passer le portail de l’école, que plus jamais je ne le franchirai de cette façon. Il faut croire que même les plus grandes découvertes de nos vies ne nous servent jamais de leçon.  
 
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J’ai fini, dans le courant de l’heure, par recevoir un petit morceau de papier plié ou se trouvait, à n’en pas douter, ce qui allait m’attendre. Si celui-ci n’était pas mauve, et ne me semblait pas porter mon destin en ses lignes, j’hésitais malgré tout à le déplier pour enfin découvrir ce qu’elle y avait inscrit. J’ai fini par m’y résoudre.  
 
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C’est à ce moment là, qu’une ultime fois, j’ai levé mes yeux et je les ai vu, planté dans le mur. Je ne les avais pas retirer, elles étaient là, comme la marque du temps qui était passé. Allais je mieux ? En souffrais je moins ? 
 
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Il existe des paradis destructeurs, mais aussi, des enfers constructeurs.  
 
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